oubliés de la république : proposer une loi "pour en finir avec 50 ans d'injustice"

Le 23-06-2009
Par xadmin

Entretien avec Naima Charaï, Conseillère régionale d’Aquitaine, déléguée à la politique de la ville et de la lutte contre les discriminations.

Pourquoi avoir créé les Oubliés de la République ?

Avec le collectif des « Oubliés de la République », nous souhaitons nous inscrire dans la lignée du formidable travail déjà réalisé en faveurs des anciens combattants issus des anciennes colonies par des associations comme le Gisti, le Catred, l'ATMF ou par le Collectif coordination décristallisation à Bordeaux. C'est d'ailleurs à la suite de la « victoire » juridique obtenue par ce collectif que nous avons décidé de créer les Oubliés de la République. Grâce à leur travail que le Conseil régional d'Aquitaine a choisi de soutenir, le 15 octobre 2008, le Tribunal administratif de Bordeaux a donné un avis favorable à la revalorisation des pensions militaires de six anciens combattants marocains mais a débouté un tirailleur Sénégalais qui avait déposé une demande similaire. En qualité de Député de la Gironde, Alain Rousset a donc décidé de déposer une proposition de loi à l'Assemblée nationale qui permettrait d'en finir définitivement avec 50 ans d'injustice. La vocation première des Oubliés de la République est donc de porter au niveau national cette cause en sensibilisant l'opinion publique et ainsi faire réagir le gouvernement. Au crépuscule de leur vie, il n'est plus tolérable que notre pays inflige à ces hommes âgés, fatigués et loin de leurs familles, un calvaire quotidien. Il est temps que la Nation reconnaisse pleinement la contribution de l'Armée d'Afrique à la libération et de notre pays et que l'ensemble de ces combattants soient récompensés.

Pourquoi selon vous, les différents gouvernements qui se sont succédés n'ont rien fait (ou si peu) pour répondre à vos revendications ?

Tout simplement parce que la revalorisation des pensions militaires a un coût et que les gouvernements successifs ont privilégié d'autres choix budgétaires. 

Que demandez-vous aux pouvoirs publics ?

Nous souhaitons tout simplement que la Proposition de loi d'Alain Rousset soit inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Si elle est adoptée, elle permettrait de rétablir l'égalité de traitement entre anciens combattants, d'améliorer l'accueil de ces hommes en France et enfin de leur permettre de choisir librement leur pays de résidence.

Où en êtes-vous de vos actions ?

En mai dernier, avec un certain nombre de personnalités (dont Lilian Thuram, Stéphane Hessel, Pascal Blanchard, etc.), Alain Rousset et moi-même avons lancé un appel au Président de la République. Publié dans Libération, cet appel est aujourd'hui signé par plus de 900 personnes. Lors d'un rassemblement que nous avons organisé le 8 mai dernier sur le Parvis des droits de l'homme à Paris en l'honneur des anciens combattants issus des anciennes colonies, nous avons souhaité leur témoigner notre reconnaissance. Des associations comme AC Le Feu, le CRAN, SOS Racisme, le GISTI, la Ligue des Droits de l'Homme, etc. étaient présentes et soutiennent notre action. Ce soutien est une force et elle nous permettra de lancer de nouvelles actions de sensibilisation dans les mois à venir.

Est-il-difficile aujourd'hui de mobiliser les gens (et notamment la presse) pour cette cause ? 

Quand le film Indigènes est sorti, nous nous sommes rendu compte que les citoyens français étaient particulièrement sensibles à cette cause. Mais si le film a fait bouger les lignes, les dispositions législatives qui ont suivi n'ont pas véritablement permis de résoudre le problème. Or aujourd'hui, les Français pensent que cette injustice n'existe plus. Il s'agit tout simplement de leur indiquer que ce n'est pas le cas. Nous avons commencé à le faire lors du rassemblement du 8 mai. Nous entendons bien réitérer et nous savons que nous obtiendront leur soutien.

Croyez-vous que vos luttes aboutiront ?

Bien sûr. Parce que c'est une question de justice, de dignité mais aussi d'honneur pour notre pays.


Nadir Dendoune

 

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