Fruit d'une recherche européenne sur les évolutions des identités de banlieues industrielles du vieux continent, l’exposition de la Maison de banlieue et de l'architecture (MdBA) ne montre qu’une partie des recherches menées sur trois territoires : la Dearne Valley en Angleterre, située dans le South Yorkshire, non loin de Sheffield, ou encore Manchester ; la province d'Alicante, au Sud-Est de l'Espagne, et enfin le territoire Evry-Corbeil, en région parisienne. 

 

« Des équipes de chercheurs ont répondu à un appel d'offre européen sur les identités. Ils ont proposé cette thématique de travail et ont obtenu des fonds européens pour travailler chacun dans leur pays, » nous explique Marie Lemoine, chargée des publics et de la communication de la  MdBA. C'est une sociologue française originaire de Corbeil, Sylvie Contrepois, qui était le pilote de la recherche portée dans six pays : Pologne, Turquie, Allemagne, Grande Bretagne, Espagne et France. Cette étude a pour objet la comparaison des évolutions des sociétés industrielles sur différents territoires et leurs répercutions sur l'identité collective des habitants. 

 

Ces cinquante dernières années ont vu le paysage industriel changer considérablement, impactant, du même coup, les habitants de ces territoires. Les trois territoires présentés ont chacun leurs spécificités, tout en ayant une trajectoire comparable. Dans la période d'après-guerre, dans ces trois territoires, les entreprises jouaient un rôle essentiel dans la vie sociale des travailleurs. Clubs de sports, écoles… de nombreuses activités se faisaient via l'entreprise : un paternalisme qui définissait l'identité du territoire où était implantée l'entreprise. 

 

 

 

Jusque dans les années 80, la Dearne Valley était une région minière. Dans les années 90, une vague de privatisation des mines a conduit petit à petit à la fermeture de la plupart des mines au profit de centres d'appels téléphoniques. La forte population de mineurs, représentée tout du long du XXème siècle par de puissants syndicats de gauche, disparaît peu à peu, pour laisser place à une population plus diverse. Aujourd'hui, les habitants de la Dearne Valley composent avec une population immigrée (Europe de l'Est, Moyen-orient, Inde...), en progression avec de nombreuses associations comme la Workers educational association, qui donne des cours pour les citoyens étrangers. Dans la province d'Alicante, spécialisée, elle, dans les produits textiles et les chaussures depuis la fin du XIXème, le virage a également eu lieu à la fin des années 80. De nombreuses entreprises ont mis la clé sous la porte, créant une hausse significative du chômage : d'autres se sont reconverties dans la chaussure de luxe. Là encore, l'immigration a crû : à la vague d'immigrants d'autres régions espagnoles (Castille, Andalousie) des les années 60-70, sont venus s'ajouter, depuis début 2000, les immigrants d'Afrique du Nord et d'Amérique Latine, qui subissent une forte exclusion dans cette région durement touchée par la crise.

 

 

 

C'est à Corbeil qu'existait le plus important foyer industriel de l'Essonne. Le premier grand bouleversement a été la création de la ville nouvelle d'Evry, dans le cadre de la politique d'aménagement du territoires, et plus précisément du Schéma directeur et d'aménagement urbain de la région parisienne (en 1965), qui sonnera indirectement la fin des industries implantées depuis des décennies. A la fin des années 70, les anciennes entreprises ferment une à une, remplacées par des activités de service. Malgré tout, à Corbeil-Essonne, il reste beaucoup d'ouvriers : 24% de la population active. Très cosmopolite (dans certains quartiers on peut compter plus de 100 nationalités différentes), cette ville compte de nombreuses associations, comme Génération Femmes, du quartier des Pyramides (Evry), qui remplit un rôle de médiation entre la population immigrée et les institutions françaises.

 

 

 

 

L'exposition ne montre donc qu'une partie des résultats de cette riche étude européenne réalisée sur cinq ans. Pour la partie française, la sociologue Sylvie Contrepois a travaillé avec des associations d'histoire locale essoniennes (CARDE, Mémoire et Patrimoine Vivant, Comité de recherches historiques sur les révolutions en Essonne, et Mémoire de la ville nouvelle). Pour son étape à Athis-Mons, cette exposition itinérante a été complétée par des travaux effectués par la Maison de banlieue et de l'architecture : « Nous avons essayé de trouver des documents en relation avec les thèmes, concernant le territoire d'Athis-Mons, Juvisy-sur-Orge et Paray-vieille-poste. Nous avons réfléchi sur ce qui fait l'identité de ce territoire et toutes les traces des différentes communautés depuis 19ème siècle » précise Marie Lemoine. 

 

Un film avec différentes archives devrait être réalisé sur cette étude, très prochainement. Attention : exposition ouverte jusqu'au 19 décembre !   

 

 

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