Rambo déplace les foules dans le 93

Le 08-08-2010
Par xadmin

Pendant que Woody Allen frôlait l’encanaillement en tournant une scène de son dernier film « Midnight in Paris » avec Carla Bruni aux Puces de Saint Ouen, « Sly » franchissait franchement le périph en débarquant à l’UGC de Rosny-Sous-Bois pour la première du film d’action « Expendables : Unité spéciale ».

Fini le temps ou les relations privilégiées avec la France étaient l’apanage de l’intello new-yorkais à lunettes dont les films connaissent plus de succès dans notre pays que dans le sien : plus de 3000 spectateurs se sont pressés pour accueillir Sylvester Stallone le 6 août. Un vrai succès malgré l’annulation de son arrivée en hélicoptère pour un problème d’assurance. Rosny n’est pas l’Afghanistan de Rambo 3 et le tapis rouge se substitue au parachutage en milieu hostile.

Depuis le succès de Taxi, et l’intronisation de Samy Naceri en héros populaire avant sa descente aux enfers, il est bien connu que les banlieusards sont friands de films d’action. Pourtant les relations entre les habitants du 9-3 et la-grosse-production-à-l’américaine-qui-fracasse-tout n’ont pas toujours été au beau fixe. On se souviendra de l’annulation par Luc Besson en 2008 des tournages de « From Paris with Love » avec Travolta à Montfermeil. On avait une fois de plus eu droit à un beau cliché médiatique avec 10 véhicules incendiés. Le Mastodonte de la production française –et européenne- ne l’avait pas pris perso. Quelque mois plus tard Il a défendu ses amis banlieusards en criant à la discrimination quand UGC à refusé de programmer son film « Banlieue 13 ultimatum » dans certaines salles de banlieue. Peut-être avait-on craint à l’époque que les jeunes « à casquette à l’envers » ne s’inspirent trop du scénario –très faible par ailleurs- qui montre les banlieues françaises plongées dans le chaos et le replis communautaire.

L’effet de dissonance entre les quartiers populaires d’outre-périph et les stars d’Hollywood a depuis été « réparé » par une initiative politique, ou plutôt diplomatique : la venue remarquée de Samuel Jackson à Bondy, qui s’était inscrite dans une série d’opérations séduction à destination des quartiers, orchestrée par l’ambassade américaine. Draguer les victimes d’injustices et la jeunesse en rupture d’un autre pays est un bon pari stratégique et surtout plus facile que de balayer devant sa porte. On se souviendra de l’initiative d’Hugo Chavez en 2005 de fournir du pétrole low-cost aux habitants du South Bronx.

Contrairement à son collègue afro-américain, ce ne sont pas des raisons diplomatiques qui ont amené Rocky à Rosny-Sous-Bois, mais bien des raisons économiques et marketing, le multiplexe UGC de la ville étant le quatrième cinéma français en termes d’affluence. Le directeur de l’établissement a d’ailleurs avoué avoir harcelé la société de production Metropolitan Films pour obtenir la présence de l’acteur. Les prochaines stars à visiter le multiplexe devraient être Brad Pitt et Angelina Jolie. Le marketing Hollywoodien ne saurait s’encombrer de périphs et autres frontières symboliques frenchy.
 

Yannis Tsikalakis

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