Comment gâcher la fête…

Le 08-07-2010
Par xadmin

Nous étions impatients de célébrer cette grande messe mondiale. Surtout que tous les médias français nous avaient expliqué ô combien cette coupe du Monde 2010 en Afrique du Sud était historique. C’est la première fois qu’elle avait lieu sur le continent africain, et dans un pays, qui célébrait dans le même temps le 20ème anniversaire de la libération de Nelson Mandela. Oui c’est certain, cette édition restera dans les annales du foot, c’est la première fois qu’un joueur est exclu pour insulte envers son entraineur, et c’est la première fois que des joueurs décident de faire grève. L’action paraît incongrue de la part de joueurs payés des millions. Il n’en a pas fallu davantage pour déclencher en France, un débat médiatico-politique. Cela pourrait prêter à sourire tant notre pays traverse des crises plus importantes : chômage, débat des retraites, stigmatisation de l’Islam. Mais une fois de plus, c’est la faute des « minorités », c’est le noir Evra qui a mené la fronde, c’est le musulman Ribery qui aurait pression sur le gentil Gourcuff.

Longtemps présenté comme un outil de rapprochement entre les peuples et un facteur d’intégration, le foot semble pourtant aujourd’hui rassembler les pires maux de la société française : prostitution, rixe, argent à gogo, caprices de joueurs.

L’élimination prématurée de la France a donné lieu à de nombreux règlements de comptes. Oubliée la France « black-blanc-beur » qui gagne. Pour Alain Finkielkraut, elle est désormais « l’équipe des caïds, de la racaille. » Le mythe n’aura donc pas fait long feu.
Ce qui démontre peut-être une certaine réalité, cette France métissée n’existe que sur le terrain ! Pourtant il existait de nombreux signes avant-coureurs, pensons par exemple à la date du 6 octobre 2001, le fameux match amical France-Algérie. Au début de la rencontre, la Marseillaise est sifflée par des jeunes issus de l’immigration. Puis dans le dernier quart d’heure, le terrain est envahi par les supporters mettant de fait, fin à la rencontre (une première dans les annales du foot français). Cette interruption relance le débat sur l’intégration. Puis en 2002, Jean-marie Le Pen qui a essentiellement fait campagne autour de l’insécurité, l’immigration, accède au second tour des élections présidentielles, une première pour un leader d’extrême droite en France. On est loin, très loin de la France « black, blanc, beur » qui gagne. Difficile de ne pas faire le lien entre les deux événements.

Jean-Marie Le Pen, le président du Front National, affirme même en 2006 que les Français ne se reconnaissent pas dans cette équipe ne chantant pas La Marseillaise et composée majoritairement de joueurs de couleur. La même année, le socialiste Georges Frêche n’hésite pas lui à déclarer : « Dans cette équipe, il y a neuf Blacks sur onze. La normalité serait qu'il y en ait trois ou quatre, ce serait le reflet de la société. Mais là, s'il y en a autant, c'est parce que les Blancs sont nuls. J'ai honte pour ce pays ».
Alain Finkielkraut, jamais avare d’une comparaison douteuse, décrit lui une équipe « black-black-black » qui donne lieu à des « ricanements » en Europe.
Ces dérapages verbaux soulèvent de vifs débats et pointent la difficulté pour la France de se voir dans sa diversité. Onze hommes qui symbolisent à eux seuls le fardeau de l’intégration de millions de personnes. On comprend plus facilement la raison de leur échec !

Nadia Hathroubi-Safsaf - Secrétaire Générale de l'association Presse & Cité

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