Daesh vote Le Pen, votons « avenir »

Dessin par Bout de geeks
Le 07-01-2016
Par Erwan Ruty

Alors que Daesh rêve d’une guerre civile en France et donc de la victoire des Le Pen à toutes les élections, on peine à comprendre pourquoi certaines paroles simples de mobilisation, d’unité et d’espoir ne sont pas émises par les décideurs, face aux menaces contraires qui assaillent la France, face au terrorisme et face à tous les replis identitaires…

 

Ces paroles rappelleraient que nous sommes un peuple deux fois millénaire qui a déjà beaucoup souffert, notamment au siècle dernier, mais ne s’est jamais laissé abattre. Nous avons connu les tranchées, Verdun et tant d’autres massacres pendant la Première guerre mondiale. Cette guerre a pourtant été plus qu’amplement commémorée récemment, mais de manière purement mécanique. Alors qu’il aurait utile de faire au contraire de cette tragédie un souvenir commun, à la fois terrible et glorieux, à partager au milieu des nouvelles souffrances qui nous assaillent. Les pouvoirs publics pourraient rappeler bien à propos comment des millions de français ont alors enduré des souffrances inouïes. Et comment pourtant, tous ensemble, comme un seul homme, nous avons vaincu. Comment, alors que avons perdu plus d’un million d’hommes, pourtant nous avons vaincu. Dire que si le terrorisme nous assaille à nouveau aujourd’hui, notre pays a cependant hélas connu bien pire et ne ploiera pas, fort de ce souvenir et de ces expériences.
Pourquoi ne pas le rappeler, pourquoi ne pas puiser dans cette tragédie la force nécessaire pour en affronter d’autres et revivifier l’héroïsme qui fut alors le nôtre ?
 

Les décideurs pourraient aussi rappeler que nous avons vu les nazis défiler sur les Champs-Elysées, et occuper tout le pays. Et combien encore d’horreurs et de malheurs, desquels nous avons même parfois été complices, pendant la Seconde guerre mondiale ? Oui, nous sommes issus d’un peuple qui a déjà beaucoup souffert, et parfois fait souffrir, mais à chaque fois, une certaine grandeur, une dignité, un esprit de sacrifice, qui font partie de notre génie national, nous ont fait surmonter ces misères. Lorsque nous avons eu à nous défaire de ce joug, d’autres peuples nous ont aidés à nous en libérer, des peuples qui parfois ployaient eux-mêmes sous notre férule.
 

Puis ces autres peuples nous ont aidés à nous reconstruire, et à tenter de fabriquer un monde meilleur. Maintenant encore, ils nous aident à rester dans la lumière d’une mondialisation parfois impitoyable. Nous avons tous ensemble partagé un destin tragique, en nous affrontant parfois les uns aux autres.
Mais malgré tout, nous avons su emmener avec nous, à nos côtés, pour partager le même destin, d’autres peuples, anglo-saxons et africains en particulier, pour nous accompagner dans notre marche et accomplir une destinée commune. Avec ces derniers, nous avons vécu une histoire commune particulièrement intense. Nous sommes encore culturellement proches. Nos destins ne sont pas séparés.
 

Nous avons vécu un passé de gloire et de souffrances mêlées, notre présent sera fatalement semé d’embûches et trop souvent jonché de morts, mais pourtant, nous savons que malgré nos faiblesses et nos difficultés, quelque chose de plus grand que nous nous oblige à nous dépasser à nouveau.
 

Nous ne nous sommes jamais laissés abattre car nous avions une destinée manifeste à accomplir qui nous était supérieure : cette infatigable recherche d’un monde meilleur, horizon qui est entre nos seules mains. Il nous revient encore, à nous et à d’autres, de nous employer à cette épuisante mais magnifique recherche ; mais cela doit se faire en nous débarrassant des oripeaux du passé : la domination de certains hommes par d’autres hommes et la domination de la nature par l’homme.
 

Or, cette destinée a récemment frappé à notre porte, à notre invitation même : pendant quelques semaines, comme jamais auparavant dans l’histoire de l’humanité ne l’avaient fait autant de nations libres et indépendantes, toute la planète a convergé à Paris pour une conférence sur la sauvegarde de Terre. Cette Cop21 qui a claqué comme un coup de fouet a pu réveiller les consciences. Elle doit maintenant être la pierre angulaire de notre nouveau destin. C’est ce destin qui doit nous faire espérer en l’avenir, nous le faire aimer et désirer, et qui doit nous faire redresser la tête quelles que soient nos difficultés présentes.
 

Aux décideurs de le rendre possible et envisageable, aux penseurs et aux savants d’en faire notre premier credo, et à tous les Français de le porter tous ensemble, comme un seul corps tendu vers un seul but, mais dans l’indispensable diversité de son être ; une diversité qui est aussi indispensable que la diversité de la nature pour que le monde continue à être monde.
 

A nous tous d’écrire ensemble cette nouvelle page de l’histoire de France et du monde. Mais pour cela, il faut se connaître et s’aimer : se connaître et s’aimer soi-même, connaître et aimer l’Autre, connaître et aimer sa patrie et son histoire et désirer être l’instrument d’un destin plus grand que soi.
 

Voilà ce qu’on aurait aimé entendre de la part des décideurs, pour nous redonner courage, et pour puiser dans le passé le sens du présent et la force d’affronter l’avenir ensemble.
Car cet avenir meilleur est possible, il a commencé à s’écrire à Paris.
 

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