Claude Touchefeu : « Il faut repenser la mixité sociale »

Le 18-10-2012
Par Erwan Ruty

 

Toulouse est gérée par la gauche pour la première fois depuis 1971. Cela n’a pas bouleversé les quartiers populaires. Claude Touchefeu, élue à la politique de la ville, ancienne élue du Mirail au Conseil Général, se penche tente de mieux intégrer ces périphéries.   

 
A la veille des troisièmes Assises de la politique de la ville, qui se tiendront à partir du 16 octobre dans cette même ville, elle prépare le terrain pour cette rencontre dont la portée, locale ou nationale, n’est pas encore clairement identifiée.  
 
Trois drames ont marqué la ville et ses périphéries : 1998, 2001, 2005…
Toulouse était considérée comme une ville de province qui n’avait pas de gros problèmes. La mort d’Habib en 1998 et les émeutes qui s’en sont suivies ont été une vraie rupture. Plus même qu’AZF, qui n’a pas été vécu de la même manière selon les quartiers, à Empalot ou au Mirail. Même s’il y avait des signes avant-coureurs. A l’intérieur des quartiers, la parole avait du mal à sortir. On avait du mal à dire de quoi cette colère était le symptôme. Le côté destructeur avait été très fort. De manière différente, les émeutes de 2005 ont aussi été très fortes. Il faut voir qu’il ne s’agit pas de problèmes liés à tel ou tel quartier, mais à toute l’agglomération : c’est une ville qui n’est ni pauvre ni en déclin, et qui croît même démographiquement, mais il y a une fracture sociale. Le premier chantier est donc le logement social et sa répartition, avant même le renouvellement urbain. Il faut repenser la mixité sociale. A Toulouse, il y a peu de politique municipale en matière de social. La politique de la ville était traditionnellement un ersatz de politique sociale ; par exemple, dans la réussite éducative, l’accompagnement à la scolarité ne se faisait que dans les quartiers en politique de la ville. Il y avait donc un traitement à part. Les pouvoirs publics se délaissaient sur les associations.  On a donc du redéployer des programmes municipaux sur l’ensemble de la ville, en matière de santé par exemple. On a raccroché la politique de la ville à une politique municipale globale. On a aussi renforcé les moyens, plus spécifiquement, sur le lien social ou la jeunesse, en finançant certains clubs sportifs comme aux Izards. On a aussi retravaillé les Grands Projets Ville, en essayant de créer un lien entre l’Université du Mirail et la Reynerie. 
 
Le problème est souvent larticipation des habitants à ces projets…
On est plus contents à Empalot, où on a pu faire de la concertation à l’occasion de trois ateliers avec les habitants avant de définir le cahier des charges du projet urbain. Ils ont mieux pu s’approprier le schéma directeur. La MJC a travaillé avec un groupe de jeunes. Mais sociologiquement, c’est vrai que c’était un public plus Blanc et plus vieux que la moyenne… Place du Morvan aussi [quartier de Bagatelle, NDLR], il y eu de la concertation. Au Mirail, c’est plus dur, même s’il y a beaucoup de services municipaux localement. A Varèse [un immeuble du Mirail, NDLR], la votation des habitants et de la régie de quartier nous a aidé à changer le projet. Pourtant, on est en régression : la politique de la ville ne peut pas répondre au chômage de masse. La fracture peut être seulement réduite. 
 
Oui, mais les entreprise locales, souvent positionnées sur les hautes technologies, embauchent-elles dans les quartiers ?
Il faut mobiliser le « droit commun » : la nouvelle politique de la maison de l’Emploi doit être de mettre cela en dynamique. Un développement économique qui ne soit pas séparé selon les quartiers. Par exemple par un pré-recrutement dans les écoles d’infirmière pour le Canceropôle. On a aussi beaucoup développé les clauses d’insertion sur tous les marchés de la politique de la ville, y compris pour les grandes entreprises : transports (Tisseo), faculté, en particulier…
 
Des Assises de la politique de la ville vont avoir lieu : les associations semblent sceptiques sur l’utilité d’y aller…
Elles arrivent à un moment charnière : le gouvernement doit lancer de nouveaux contrats de ville. Les associations y ont leur place : elles se plaignent d’avoir été transformées en prestataires de services. On doit recréer le sentiment que quand on est financé, on doit participer à la définition de la commande publique, pas seulement s’engager dans la mise en œuvre. Seules celles qui disent « on ne veut pas être dans le processus » posent problème. Les discussions qui ont eu lieu avant permettent de ne pas partir de zéro.
 
Propos recueillis par Erwan Ruty
 
 
 

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