Les cités-jardins, rêve ou future réalité

Le 07-05-2013
Par Charly Célinain

Les cités-jardins, une utopie devenue réalité au début du XXème siècle. A l'heure où l'écologie prend  une part de plus en plus importante dans l'urbanisme, le modèle des cités-jardins revient au goût du jour. 

 
Au début du XXème siècle, l'urbaniste anglais Sir Ebenezer Howard conçoit une ville idéale qui comprendrait les avantages de la ville et de la campagne. Des cités ne dépassant pas 30 000 habitants, s'étendant sur 2500 ha (dont seulement 400 pour la construction), entourées de terrains agricoles. En France, de 1901 à 1936, Paris passait d'1 million à 3,4 millions d'habitants. A cette époque des cités-jardins ont été construites en périphérie pour désengorger la capitale. Modèle abandonné dans les années 60-70, les cités-jardins ont été « redécouvertes » à la fin des années 80. Fin avril dernier, l'Institut d'Aménagement et d'Urbanisme (IAU) organisait un colloque international intitulé : « Les cités-jardins : un idéal à poursuivre ». Comment ces quartiers ont-ils évolué ? Comment s'inscrivent-ils dans le paysage urbain contemporain ? Les experts présents apportent leur éclairage.
 

Adapter les cités-jardins

« L'usage de l'espace publique a changé, ne serait-ce qu'à cause du stationnement des voitures. Il faut prendre en compte la transformation des équipements, les besoins en bains-douches ne sont plus les mêmes » explique Jean-pierre Palisse, architecte et urbaniste, directeur adjoint de l'IAU-IdF. Outre ces problématiques soulevées par l'urbaniste, les enjeux climatiques et énergétiques sont également bien différents de nos jours. Autre enjeu de taille, la question de la diversité sociale suscite de nombreuses interrogations : « Peut-on arriver à faire cohabiter du neuf avec de l'ancien ? Comment éviter de faire des ghettos de logements sociaux ? Il faut garder une mixité fonctionnelle en maintenant les commerces, les services etc dans la cité » selon Jean-pierre Palisse. 
 

Les temps changent

« L'habitat est la combinaison du logement et de son environnement. Avec l'évolution démographique, le schéma de la famille nucléaire (un couple, deux enfants) a explosé en plusieurs modèles : famille monoparentale, recomposée... La vie a changé et l'habitat avec » analyse Monique Eleb, psychologue et docteur en sociologie de l'habitat. Cette dernière loue l'objectif initial des cités-jardins avec le centre communautaires qui serait au centre de la cité, avec des accès aux équipements à moins de 500 mètres de chaque habitation. Une mise en place qui, pour la psychologue, favorise la mixité de différentes façons : « Mixité fontionnelle (logement, crèche, école...), mixité sociale et mixité typologique (immeuble et maisons) ». Un schéma qui paraît bien beau sur le papier, mais qui rencontre très vite des limites.
 

La place de l'habitant

En 2000, une cité-jardin a été créée dans le bassin minier Nord Pas-de-Calais. Raphaël Alessandri, architecte et urbaniste responsable du projet, a rencontré ce problème humain de la place de l'habitant dans cette nouvelle cité, construite à l'emplacement d'une ancienne cité : « Cette cité logeait des mineurs à proximité des puits. Elle avait un fort patrimoine social, mais les ayants-droits des mineurs ne représentent plus que 30% des habitants. Beaucoup d'entre-eux ont été remplacés par des locataires précaires. Comment recréer un quartier avec des gens qui n'ont pas la même histoire ? ». A ce problème de mixité vient s'ajouter celui du dénigrement du terme « cité ».
 

Fier de sa cité

« Il y a cette appellation péjorative de la cité de banlieue. La plupart des habitants n'appréhendent pas le caractère exceptionnel de leur cadre de vie. L'entretien de ces lieux est une priorité » déclare Jean-Pierre Respaut, adjoint au maire de Suresnes, faisant notamment référence à la cité-jardin de sa ville. « Dans ces quartiers, il existe clairement un sentiment de relégation sociale (…) Il faut imposer la mixité sociale et développer l'accession à la propriété. Les habitants des cités-jardins ne doivent pas être ghettoïsés, il doivent ressentir une fierté de les habiter » selon le maire-adjoint de Suresnes. Etre fier de sa cité n'est pas forcément un problème, simplement l'état de délabrement de nombreuses cités, la difficulté d'accès, le manque de transports en commun sont autant d'éléments qui accentuent ce sentiment de relégation dont parle Jean-Pierre Respaut. Et finalement la parole des habitants, les principaux intéressés, va surgir par une citation. Monique Eleb rapporte les dires d'habitants de l'éco-quartier de la Bottière Chenaie à Nantes, dont la construction s'achèvera en 2015 : « On a mis des blacks, des beurs, des blancs, des divorcés... c'est généreux mais ça ne marche pas ! ». Pas simple de créer de la mixité. 
 
Les cités-jardins peuvent-elle être une solution dans les quartiers les plus défavorisés. Avoir un cadre de vie plus agréable, qui prend en compte les problématiques écologiques, pourquoi pas. Avoir tout à portée de main, ne pas avoir besoin de se déplacer, très bien. Mais ne pas pouvoir se déplacer quand on en a envie, ça reste un gros problème. Une prison avec des barreaux dorés reste une prison.
 
 

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