Laetitia Nonone : « Si les politiques ne changent pas les quartiers, nous on les changera ! »

La coordination "Pas sans nous" à Nantes, le 05 septembre 2014
Le 19-12-2014
Par Erwan Ruty

Alors que les pouvoirs publics parassent impuissants à juguler la crise dans ces quartiers, l’action associative a-t-elle encore un avenir ? "Pas sans nous", syndicat des quartiers regroupant plusieurs dizaines d’associations constitué suite au rapport Mechmache-Bacqué sur la participation, veut y croire. Pour autant, Laetitia Nonone, sa représentante Île-de-France, ne mâche pas ses mots.

 

P&C : Vous pensez que la politique peut encore faire quelque chose pour les quartiers ?
L. N. :
On a vu avec la mission Mechmache-Bacqué, qui a consulté Zonzon93, mon association, qu’il y avait une bonne dynamique. Maintenant, les débats, c’est bien, mais il faut passer à l’action ! Les 30 ans de la Marche pour l’égalité, c’était un moment historique important, mais ça ne m’a pas touché plus que ça. La carte de résidence pareil, ça ne nous touche pas plus que ça, même si c’était normal, à l’époque, de se battre pour ça. On a juste vu qu’à l’époque, ils n’avaient pas d’expérience, alors que nous, on sait qu’ils se sont battus, qu’il y a eu SOS Racisme, etc. Et la double peine pour les immigrés, d’une certaine manière, elle existe encore. On se bat encore aujourd’hui pour les mêmes droits, mais le combat est différent. Pas sans nous, c’est la suite de l’histoire.



P&C : Mais les habitants des quartiers ont-ils encore envie de politique ?
L. N. :
Il y a beaucoup de gens qui disent que notre coordination va se faire récupérer. Mais si ces gens n’entrent pas dedans, qui fera barrage à la récupération qui pourrait arriver ?! Maintenant, moi, je suis une femme, je suis noire, je vis dans les quartiers, je vis « quartier », je dors « quartier », je mange « quartier », je kiffe « quartier », et si les politiques ne changent pas les quartiers, nous on les changera ! Les mecs qui n’ont pas encore confiance en la politique et qui sont en bas des murs, il faut les faire rentrer dans la coordination. Ca sera une vraie coordination quand ils seront là. Il ne faut pas qu’il n’y ait que des chercheurs. Même moi, je suis limite une vraie professionnelle de l’éducation spécialisée… On a eu une réunion avec des mecs de Tremblay qui parlent avec des « ouesch », des jeunes, des Noirs, des Arabes qui ont monté un collectif, avec un vrai débat, ils ont l’air d’accord pour rentrer… Mais il leur faut une vraie motivation. Quand tu es étiqueté « coordination », les gens qui manquent d’interlocuteurs peuvent s’adresser à toi.



P&C : Que demande la coordination aux pouvoirs publics ?
L. N. :
Aujourd’hui, les dispositifs ne marchent pas surtout parce qu’il n’y a pas de suivi avec les habitants. D’où la création des conseils citoyens, qui parleront de ce dont les gens ont envie, pas avec un ordre du jour écrit par la mairie ! Les fonds pour la prévention de la délinquance, on doit pouvoir dire qu’il faut les mettre soit dans la vidéosurveillance, soit plutôt dans des actions de prévention, par exemple.



P&C : Pour vous, quelle est la priorité de la coordination ?
L. N. :
D’abord, mettre en place les conseils citoyens portés par els habitants. Après, on verra les groupes de travail « police » ou je ne sais quoi encore…
 

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