Il y a cinq ans les banlieues s'embrasaient

Le 10-01-2011
Par xadmin

Clichy-sous-Bois, un certain 27 octobre 2005 : alors qu’ils voulaient échapper à un contrôle de police, Zyed Benna, 17 ans, Bouna Traoré, 15 ans et Muhittin Altun, 17 ans, se réfugient dans un transformateur EDF. Deux d’entre eux meurent électrocutés, le dernier est grièvement blessé.

Les cinq nuits qui suivent le drame, les quartiers du Chêne-Pointu et du Bois-du-Temple à Clichy-sous- Bois s’embrasent. Durant ces
échauffourées, une grenade est lancée par les forces de l’ordre dans la mosquée Bilal. Origine de la propagation des violences ? Le lendemain, en tout cas, les incidents touchent les quartiers voisins des Bosquets, à Montfermeil, ainsi que plusieurs autres villes de Seine-Saint-Denis, et Paris. Chaque jour, d’autres quartiers de France s’engouffrent dans ce qui va devenir la révolte française la plus importante depuis mai 68. Du 5 au 9 novembre 2005, les événements atteignent leur paroxysme. Le 7, le premier ministre Dominique De Villepin annonce la possibilité pour les préfets de recourir au couvre-feu, mesure en sommeil depuis la guerre d’Algérie. De nombreuses communes prennent la balle au bond, mais l’accalmie ne vient pas. Onze jours après les faits, le 8 novembre, l’état d’urgence est décrété pour une durée de trois semaines consécutives, sur vingt-cinq départements français. Le 14 novembre, il est prolongé de trois mois.

4700 interpellations.
Les politiques semblent incapables d’expliquer ou de comprendre réellement la situation. Pour le ministre de l’intérieur, Nicolas Sarkozy, « il y a plus de problèmes pour un enfant d’un immigré d’Afrique noire ou d’Afrique du Nord que pour un fils de Suédois (...). Parce que la culture, parce que la polygamie, parce que les origines sociales font qu’il a plus de difficultés. » Celui-ci annonce le 8 novembre avoir demandé aux préfets l’expulsion des étrangers condamnés dans le cadre des violences urbaines. Le président Chirac ne s’exprime que le 14 novembre : « Ce qui est en jeu c’est (…) la réussite de notre politique d’intégration. Il faut être strict dans l’application des règles du regroupement familial. Il faut renforcer la lutte contre l’immigration irrégulière et les trafics qu’elle génère » assure-t-il. Ce n’est que le 17 novembre que la police déclare un retour à la normale. Le bilan est lourd : 300 bâtiments et 10 000 véhicules ont été incendiés sur le territoire, pour un coût estimé à 250 millions d’euros. 4700 interpellations ont eu lieu, 130 policiers et émeutiers ont été blessés.

« Sans leader et sans proposition de programme » - Les RG

De « guérilla urbaine » à « émeute islamiste » en passant par « mouvement de révolte populaire », le soulèvement des quartiers français aura été affublé de divers noms. Mais restera irrécupérable politiquement, incompris et ingérable. « La France a connu une forme d’insurrection non organisée avec l’émergence (…) d’une révolte populaire des cités, sans leader et sans proposition de programme », estimeront dans un rapport les Renseignements Généraux. « Tout s’est passé comme si la confiance envers les institutions, mais aussi le secteur privé, source de convoitises, d’emplois et d’intégration économique, avait été perdue. »
Le 22 décembre 2005, le gouvernement met en place un préfet délégué à l’égalité des chances sur les six départements les plus touchés par les violences. L’un des policiers qui poursuivait les trois jeunes de Clichy-sous-Bois, ainsi que son interlocutrice
au commissariat, sont poursuivis pour non assistance à personne en danger. Le 22 octobre 2010, deux juges d’instruction de Bobigny ordonnent leur procès contre l’avis du parquet, qui avait requis un non-lieu pour «charges insuffisantes». Le 25 octobre, le parquet a fait appel de cette décision.

Nadia Sweeny - Ressources Urbaines
 

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