
Grigny-Wood ou l'exception culturelle grignoise

Et si la Californie ne se trouvait qu'à quelques stations de RER de Paris ?! Direction l'Essonne où une ville en particulier a adopté les codes des G'z de L.A. Bienvenue à Grigny-Wood.
Toute consonance avec le nom du mythique district de Los Angeles n'est absolument pas fortuite. Croisé au détour de déambulations sur la toile, le blog Grigny-Wood, tenu par un grignois, décrit le lifestyle de sa ville, un vrai état d'esprit. Il est très possible, qu'aux abords de la Grande Borne, vous ayez entendu parlé de l'Essonne-Gelesse. Dans cette version frenchy de la cité des anges, Compton, LBC, South Central ont fait place aux quartiers de La Grande Borne, Tuilerie ou encore Grigny 2.
Pas de Californie ensoleillée, mais le style reste soigné. Dickies, chemises à carreaux, des codes vestimentaires qui ont traversés l'atlantique dans des clips des N.W.A [Groupe de Dr Dre, Ice Cube et Eazy-E notamment] et dans les films de John Singleton (Boyz n'the hood) et autres frères Hughes (Menace 2 society), dans lesquels la musique tient un rôle prépondérant. Crachée des ghettoblasters des quartiers de Los Angeles, la G-Funk envahit le monde entier et squatte le 9.1. Oui, tous ces codes, appartiennent à une autre époque, le début des années 90, âge d'or de la fameuse West-coast.
Grigny-Wood témoigne d'une réalité, d'autres habitants en donnent également leur vision comme Kizo. Issu de l'ancienne génération, ce dernier est un ex-membre de gang, en France pas à L.A. Parce que l'Hexagone n'a (presque...) rien à « envier » aux Bloods et aux Crips. Pour autant, aujourd'hui Kizo ne fait pas l'apologie de la violence, bien au contraire. Réalisateur de la série Grigny Glen Park (visible sur Youtube), il s'attache à montrer sa ville et ses quartiers sous un autre jour, son vrai jour. Depuis deux ans, cette série vidéo suit la jeunesse de la Grande Borne. Pas en train de traîner en bas des barres, mais en pleine séance de skateboard ou autre street workout [musculation de rue, ndlr]. Et boom ! Il a suffit d'un malheureux fait divers dans le RER D en avril 2013 pour que les médias jettent la jeunesse de Grigny au bûcher, sous le feu des projecteurs.
Sabotage d'un travail qui redonnait le sourire et une vraie fierté aux grignois. Kizo nous fait découvrir la jeunesse de la Grande Borne. Dans un parc, avec aucun autre décor que ce que l'on devine être une oeuvre contemporaine, quatre jeunes enchaînent les saltos devant une dizaine d'autres assis sur une barrière. Les acrobates se surnomment les MFG : Moustiques Family Gang. Pourquoi des saltos ? Réponse : « Comme on galérait, on s'est mis à faire des saltos. Je savais les faire, j'ai appris aux autres ».
Comme ses aînés, la jeunesse de Grigny se démarque, mais d'une façon différente. Par le langage, les expressions. « Bails » (les affaires), « Bougs » (les gars) ces mots sont devenus une vraie marque de fabrique. Made in Grigny et plus largement 91. Ces expressions qui se sont exportées dans la France entière avec les textes du rappeur de Corbeil : Ol'Kainry. Expressions qui ont contaminé le reste de la région parisienne, du coup il n'est pas rare d'entendre des « bougzères » dans la « streetzère » dire « C'est quoi les bails ? ». C'est un peu l'exception culturelle grignoise. Certains antillais feront remarquer que « boug » est un mot créole, qui vient du français « bougre ». N'en déplaise au boug'Toubon, Grigny, à l'instar des banlieues françaises, apporte sa contribution à la langue française !