Faux-plan de Macron : la banlieue restera-t-elle prisonnière de sa mauvaise représentation ?

Le 25-05-2018
Par Célia Kadi

Mardi 22 mai, le chef de l'Etat Emmanuel Macron a tenu face aux membres du comité présidentiel des villes et près de 600 invités, un discours fleuve en réponse au rapport Borloo. Une réponse qui commencera par "je ne vais pas vous faire de discours " et "Je ne vais pas vous annoncer un plan banlieue" pour se finir deux heures plus tard. Le MediaLab93 s’est entretenu avec des acteurs de banlieue qui étaient à l’Elysée, pour leur demander si la représentation de la banlieue pourrait être modifiée après ce discours.

« Emmanuel Macron a voulu casser la logique du "ghetto" en annonçant dés le début qu'il ne sera pas question de plan banlieue » relève Adile Farquane. Selon le journaliste de la chaine Numéro 23 et membre du Comité présidentiel des villes, ce changement de méthode va permettre un changement d'action et redonner espoir dans les banlieues.

"LA RÉUSSITE PASSE PAR L'ÉCOLE"

Les principaux éléments qu'Adile Farquane met en avant du discours de Macron sont l'éducation et l'emploi. Ces deux éléments seraient la source de tous les problèmes et si le problème est attaqué à la source alors un changement est envisageable : "La réussite passe par l'école et l'emploi est la clé de la réussite" explique Adile. Selon lui, « il faut réconcilier les jeunes avec l'école et les entreprises. La base de toute chose est de réinvestir l'école de reprendre dès l'acquis des fondamentaux ».

"IL FAUT PROVOQUER L'EFFET MIROIR"

La faible représentativité dans les médias est ce que déplore Adile. Sa lutte au sein de ce comité présidentiel des villes sera de changer les images de la banlieue dans les médias traditionnels.
La couverture médiatique ne peut qu'être faussée si dans les médias traditionnels les habitants de banlieue ne sont pas représentés : « Il faut provoquer l'effet miroir, il faut continuer à y avoir des Christine Taubira... Mais il va falloir beaucoup de temps avant d'arriver à changer l'image que les français ont de la banlieue » confesse Adile. "Leur regard est faussé et les quartiers restent stigmatisés".

"IL N'A PAS ÉTÉ QUESTION DU TRAITEMENT MÉDIATIQUE"

Edouard Zambeaux, co-fondateur de la ZEP (Zone d'Expression Prioritaire) explique son mécontentement concernant l'absence de certains sujets importants. La perception qu'ont les gens de la banlieue passe par la représentation qui est faite de celle ci dans les médias explique-t-il. Le problème étant que "la banlieue est prisonnière d'une représentation" qui n'est pas la sienne et dont elle n'est pas maître. Selon Edouard Zambeaux, le "discours du Président de la République ne changera rien à la situation des banlieues et encore moins à la perception que s'en font les français". Ce "non-discours" laisse un goût d'amertume. Il n'a rien énoncé de nouveau et "beaucoup de questions restent sans réponse », juge l’ancien journaliste de Radio France.

"IL FAUT INTÉGRER [LES HABITANTS DE BANLIEUE] À DES DISPOSITIFS DÉJÀ EXISTANTS"

Certains acteurs associatifs de banlieue ont eu l'opportunité d'exprimer leurs revendications directement à Jean-Louis Borloo. Thibault, engagé dans une association pantinoise, était présent pour le discours du Président de la République. Il nous explique que le principal manque de ce rapport concerne les "associations locales" de banlieue qui ont été oubliées, au profit de grosses associations telle que Mosaïk RH, qui n'ont désormais plus besoin d'aide.
Un ras-le-bol des "dispositif bis", d'après Thibault : « Tout cela n'est qu'un plan cosmétique ; il faut arrêter de créer des outils spécifiques pour les habitants de banlieue, et les intégrer dans ceux déjà existants."

"IL Y A UNE REPRÉSENTATION GALVAUDÉE DES JEUNES DE BANLIEUE"

Thibault ne fondait aucun espoir en "ces rapports et ces discours pour la banlieue". Selon lui, "ça ne sert à rien de faire des rapports révolutionnaires". Le pantinois regrette qu'il n'y ait pas été question du traitement médiatique qui propose « une représentation galvaudée des jeunes de banlieue ». Une réalité qui n'est pas prête de changer après cette prestation élyséenne.

 

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