Clichés urbains : voir ce qu’on ne regardait pas

Que de chemin parcouru par cette association créée en 2002 par trois étudiantes de l’Université Paris 8. Ressuscitée d’une « mise en veille » en 2006, la structure s’installe progressivement comme un acteur « photo » reconnu auprès du public jeune des quartiers populaires du Nord-Est parisien et au-delà.

« Trois étudiantes du DESS de gestion culturelle de Paris 8 disposaient de 1500 euros pour un projet sur les exclus du forum des halles, qui avait été abandonné faute d’autorisation, explique Marich Devise. En rentrant, en 2006, d’une année sabbatique au Nord du Brésil où j’avais fait un travail photographique avec un centre culturel proche d’une favela, on m’a proposé de faire quelque chose avec cette somme. Grace à une amie qui travaillait à Montreuil, j’ai eu accès aux jeunes (6-12 ans) de la Cité Espoir. On a passé en revue les bases de la photographie avec eux, notamment un faisant des sténopés* avec des boîtes de conserve. Avec l’appui de la mairie nous avons organisé une grande expo à la verrière de la cité. Ca a beaucoup plus dans le quartier car ça a valorisé le lieu et les enfants. »

Forte de ce premier succès, après l’installation de Marich dans le 19ème, l’association trouve un local à la pépinière Mathis dans la rue du même nom. Petit à petit des partenariats sont négociés et des ateliers photographiques sont mis en place sur le territoire Riquet-Orgues de Flandres – Curial –Cambrai. La structure est désormais passée à une étape supérieure d’activité en rémunérant une salariée et des photographes professionnels intervenant dans les ateliers.

En plus du travail pédagogique, clichés urbains contribue à tisser des liens entre des territoires voisins mais aux relations parfois conflictuelles : « le territoire Riquet – Orgues de Flandres est en rivalité avec Cambrai. Or on y a emmené les jeunes pour faire des sessions de sténopé. Les jeunes hallucinent avec le procédé, ils se marrent puis ils jouent au foot ensemble. Là-bas nous bénéficions de la collaboration bienveillante du centre Curial dirigé par Sadia Diawara. »

L’action de l’association permet de révéler la richesse esthétique et artistique de ces quartiers souvent déconsidérés : « Ces cités permettent de faire des images hallucinantes. On essaye de documenter le quartier de manière positive. On part par exemple à la recherche du travail des graffitis artists excellents qu’on peut trouver dans les friches du quartier. C’est pour les enfants un éveil à l’image en général mais aussi à la beauté de leur quartier qu’ils ne regardaient pas avant. Il s’agit pour eux d’avoir une meilleurs auto-estime, mais aussi de montrer ce point de vue à tout le monde ».

Disposant d’un stand lors de l’événement Rue Hip hop de la Villette, l’association ambitionne de devenir la référence en matière d’atelier de photo urbaine dans le quartier. Parmi les projets envisagés : une collaboration avec le photographe JR pour réaliser des affiches géantes à placarder sur des immeubles à partir de photos de groupe des enfants ou encore une expo « Nord-Sud » avec des enfants maliens pour les Rencontres Photographiques de Bamako : « j’aimerais organiser des ateliers photo là-bas et qu’en changeant les fonds lors de session de retouches on ne puisse pas distinguer qui vient d’ici ou de là-bas ». L’objectif à terme : « proposer une offre d’accompagnement culturel et éducatif globale ».
 

* appareil photo « maison » fait avec un trou dans une boite et du papier photosensible

 

http://www.cliches-urbains.org/

 

YT
 

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