Qu ’on t-ils fait de leurs 5 ans ? Houria Bouteldja

Le 07-12-2010
Par xadmin

« Les politiques gardent le même type de lecture que pendant la colonisation. »

« Un certain nombre militants du collectif « Une école pour tous » avaient rejoint le mouvement dès son lancement en 2005. Nous nous sommes, alors, interrogés sur la nécessité de lancer un mouvement dépassant la lutte contre l’islamophobie. Car, le sujet renvoie au post- colonialisme en France à savoir le racisme, la négrophobie, la discrimination… L’ère de la colonisation est certes, quasiment, terminée. Pour autant, il reste une forme de domination à la fois culturelle, économique et militaire. Dans l’Hexagone, le rapport colonial dans les quartiers populaires existe. Ces quartiers sont des zones périphériques où les gens vivent tassés. Le sentiment d’y être traité « comme des bougnoules » prédomine. Les émeutes de 2005 sont fondamentalement liées aux conditions sociales. Les gens des quartiers concentrent pauvreté, chômage, mal logement, écoles déclassées. Le caractère racial de ces émeutes est une conséquence de la politique de l’Etat dans ces quartiers. D’ailleurs ce n’est pas anodin de voir, à ce moment là, des jeunes brandir leur carte d’identité française devant les caméras. L’affirmation de l’identitaire est une bouée de sauvetage…Franchement, je n’étais pas surprise de voir tout exploser vu la situation des quartiers. Ne parlons même pas de l’offensive médiatico-politique et du racisme décomplexé après le 11 septembre 2001. S’en sont suivis la campagne contre Tariq Ramadan, Le Pen au premier tour des présidentielles en 2002. Pendant plusieurs années, ces populations se sont pris tout cela en pleine figure. Le Parti des Indigènes de la République (PIR) n’est pas un hasard de l’Histoire… Les émeutes ont conforté notre démarche initiée en janvier 2005. Tout le monde nous est tombé dessus en dénonçant notre pseudo posture ethniciste. En réalité, on reste dans une espèce d’aveuglement. Les politiques gardent le même type de lecture que pendant la colonisation. Souvenez vous que Dominique de Villepin, alors Premier ministre pendant les émeutes de 2005, a imposé le couvre-feu. Je rappelle quand même que la mesure a été appliquée deux fois depuis 50 ans : le 17 octobre 1961 lors de la manifestation pacifiste des militants FLN à Paris et en 1985 en Nouvelle-Calédonie. En mai 68, il n’y a pas eu de couvre-feu. Pourtant les dégâts étaient plus importants qu’en novembre 2005… En définitive, le PIR a trois adversaires : les laïcards, l’extrême-droite et les sionistes. Notre action vise à nous implanter dans les quartiers à travers des interventions locales, car la légitimité passe par une implantation locale. Un enjeu essentiel pour créer un rapport de force en faveur des quartiers populaires. On ne prétend pas inventer des solutions clés en main mais si nous sommes sollicités, nous interviendrons sur des questions qui nous concernent. »
 

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