Magazine Roots : la nouvelle génération prend le pouvoir

Depuis un peu plus de deux ans, le petit monde afro-antillais parisien a vu émerger un nouveau magazine : Roots. Culture, mode, racines, des thèmes que veut dépoussiérer ce nouveau venu sur le marché « Afro ».

 
Roots, titre du livre d'Alex Haley (ainsi que de la série culte qui en a été tirée), maintenant aussi le titre d'un nouveau magazine sur la culture Afro-antillaise. Comme Kunta Kinte, le héros du roman de l'auteur américain, Michaël Kamdem, créateur du magazine, court vite. A peine sorti de son école de commerce, ce dernier crée son magazine. En deux ans, cette publication gratuite a réussi à trouver un équilibre financier dans un monde de la presse écrite pour le moins moribond. Coup de projecteur sur cette initiative d'une nouvelle génération : la génération Roots.
 

« Un bon melting pot »

Malgré la relative jeunesse du magazine, l'équipe est déjà bien étoffée : cinq membres fixes au bureau sans compter les photographes et les nombreux rédacteurs qui travaillent en free lance. Toute une équipe venant d'horizons divers, nous assure Diane Audrey Ngako : « Nous avons une équipe très variée avec trois camerounais, une éthiopienne, une antillaise, une française [de souche, ndlr], un nigérian... en fait, c'est un bon melting pot ! ». Une grande équipe multicolore chargée de faire vivre ce magazine trimestriel (bimestriel à compter de mars 2013), créé en 2011 et tiré à 10 000 exemplaires distribués uniquement sur Paris et la région parisienne.
 

Marketing ethnique

La réussite d'un magazine tient aussi souvent à la quantité de ses annonceurs. Avec plus d'une quarantaine annonceurs sur les derniers numéros, Diane Audrey Ngako, chef de pub, peut voir venir : « Ils prennent souvent des pages à l'année. Quand Michaël a commencé, il n'avait pour capital de départ que 3000 euros et une quinzaine d'annonceurs pour financer le premier numéro. Il y est allé à la gnaque ! ». En regardant les annonceurs, on peut s'apercevoir qu'il y a des restaurants, des compagnies aériennes ainsi que beaucoup de produits ou de services liés à la beauté : « Le marketing ethnique se développe énormément donc on est sur un bon filon. De plus, les femmes noires achètent cinq à six fois plus de produits de beauté que les femmes blanches » selon Diane Audrey. Cette dernière s'appuie sur les résultats d'une étude hygiène-beauté réalisée par l'agence de marketing ethnique Ak-a, avec laquelle le magazine collabore régulièrement. L'intérêt des marques de cosmétiques qu'ont, à apparaître dans ce magazine, est donc évident. Et ce, que les marques soient spécialisées dans les peaux noires ou pas, comme L'Oréal, qui cherche toujours à développer sa série pour peaux noires.
 

« Fédérer un réseau »

Mais avec des rubriques « racines », « culture » ou encore « icônes », des portraits de personnalités noires, Roots est bien plus qu'un simple magazine de mode comme nous le confirme Michaël Kamdem : « L'idée était de fédérer un réseau de personnalités, d'entrepreneurs et d'acteurs de la scène afro, autour du magazine. A ce niveau, il y a un sérieux manque en France. De temps en temps, on agite un Roselmack ou une Rama Yade, mais les noirs sont quand même peu présents dans les media ». Pourtant, selon lui, le potentiel est là : « Il faut rendre visible ces talents qui existent. Il y en a des entrepreneurs mais chacun fait ses affaires de son côté. Il faudrait qu'on puisse travailler ensemble à l'image de ce qui se fait aux Etats-Unis ou en Angleterre ».
 

Communautarisme ?

Même s'il est résolument tourné vers les afro-antillais, le créateur du magazine insiste sur le fait qu'il a vocation à être lu par tout le monde. Diane Audrey confirme : « Nous essayons d'être très ouverts, que ce ne soit pas trop féminin, pas trop masculin, pas trop africain, pas trop antillais, c'est un vrai mélange ». Malgré tout, Michaël Kamdem confie avoir déjà été taxé de communautarisme, sa réponse est cinglante : « Il ne se passe rien pour nous et quand on fait quelque chose, les gens disent que c'est du communautarisme ! Chez Elle [le magazine], dans de nombreux media, à l'Assemblée Nationale, il n'y a quasiment que des blancs, pourtant ça ne choque personne et on ne les taxe pas de communautaires ». C'est dit, le créateur de Roots ne se laissera pas enchaîner aux clichés.  
 
Quoiqu'il en soit, le magazine Roots en est à son septième numéro et n'a pas l'intention d'en rester là. Quand nous les interrogeons sur un tirage national, eux pensent déjà à distribuer hors des frontières, à Londres ou dans un pays africain. Ambitieuse, sans complexes, la génération Roots est en marche.
 
 
 
 

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