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Rapport Averroès : quelle diversité dans les médias ?

Comme chaque année, le club Averroès a publié son rapport sur la diversité dans les médias. Insistant sur les médias audiovisuels, il comptabilise notamment les personnes « issues de la diversité » présentes à l’antenne des différentes chaînes. Pour plusieurs d’entre elles un réel progrès est constaté. Mais quel est l’impact qualitatif de la diversité des recrutements sur les contenus ?
Que ce soit TF1 ou M6, mais aussi les chaînes de France Télévisions, sous une nouvelle présidence jugée volontariste en la matière, les grandes chaînes hertziennes ont insufflé de la diversité sur leurs antennes. Reste, notamment pour les chaînes publiques, à exploser le « plafond de verre » qui empêche l’accès de nouvelles têtes « au sein des directions opérationnelles ».
Le rapport est moins tendre en ce qui concerne les chaînes d’information en continu qui « n’ont guère fait d’efforts en matière de minorités visibles cette année », à l’exception de France 24 naturellement plus propice à la diversité de par sa vocation internationale.
Mauvais élèves désignés, comme l’année dernière, les rédactions de la presse écrite ne peuvent plus arguer un manque de journalistes « issus de la diversité » à la sortie des écoles. Et pour cause, la plupart des écoles de journalisme ont fait des efforts en direction des étudiants venant de la banlieue et/ou de parents étrangers. Outre le recrutement, la critique vis-à vis de la presse écrite concerne également le traitement de la diversité qui, hormis un progrès dans les illustrations et les portraits, s’aggrave avec « de moins en moins de prudence », et des « mots et des « opinions » à l’emporte-pièce « balancés » sans réflexion et sans mesure ».
Le traitement de la diversité est-il pour autant meilleur sur le petit écran ? Les avancées en termes de « diversité des visages » n’ont-il pas plutôt masqué une stagnation –voir un recul- de la « diversité des messages » ?
Comme souvent, un élément à la marge, en annexe du rapport, est plus qu’évocateur : la question de la place des « cultures urbaines » dans le PAF et notamment à la télévision. Car loin de se cantonner à un style musical, les mouvements culturels autour du hip-hop rassemblent bientôt deux générations autour d’une vision qui fait fi des barrières culturelles. Pourtant la représentation des artistes des cultures urbaines à la télévision –notamment dans les talk-shows, les émissions de live et les JT- est inversement proportionnelle à leur succès auprès du public. Dans les grandes chaînes le hip-hop reste cantonné à la banlieue alors qu’il tend vers « une culture populaire globale » selon le Club Averroès. Bruno Laforestrie, directeur de Générations FM et président de l’association Hip-Hop Citoyens, consulté pour ce rapport, a un début d’explication : « Il y a chez la plupart des décideurs une mauvaise connaissance de ce que sont ces cultures et pour une autre partie un mépris, notamment envers le rap, vu comme une culture d’ados.»
Pourtant avec des expositions autour du graffiti au Grand Palais ou à la Fondation Cartier, le monde de la culture est en passe de reconnaître les cultures urbaines comme une culture à part entière. Dans le même sens, à Paris, la quinzaine de « Paris Hip-Hop » portée par Hip-Hop Citoyens est devenu un événement incontournable et reconnu en tant que tel par les acteurs publics. Pour le directeur de Générations « Les acteurs culturels, le ministère de la culture ou les collectivités locales sont en contact avec le public et se rendent compte du succès des cultures urbaines » contrairement aux grands chaînes « qui accordent plus d’importance aux téléspectateurs de plus en plus âgés ou aux enfants au détriment des 15-30 ans ». Le Rapport du club Averroès préconise ainsi « la mise en place d'outils permettant de cerner précisément l'exposition musicale en fonction de l'esthétique et sa réelle représentativité en terme d'impact populaire ». Bruno Laforestrie, qui n’est pas étranger à la proposition, précise : « Aujourd’hui le CSA sonde les usagers sur la programmation musicale, les sujets médias et les passages antenne. Il faut une qualification par genres musicaux pour qu’il y ait une correspondance entre la représentation à l’antenne et le succès auprès du public, que ce soit en termes de ventes de disques ou de diffusion radio ».
En effet, si la télévision se doit d’être à l’image de la société française, elle ne peut pas faire l’impasse sur ses goûts et ses aspirations sociales et culturelles.
Yannis Tsikalakis
télécharger le rapport 2011 du club Averroès
http://www.clubaverroes.com/
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