Fadila Mehal (MODEM) : « mettre en place un ministère de l’égalité »

Le 01-03-2012
Par xadmin

3 questions à Fadila Mehal, responsable Intégration, égalité des chances et lutte contre les discriminations pour le MODEM

Sur la question de la politique de la ville, vous avez dit qu’il fallait installer une véritable gouvernance pour piloter toutes les aides qui existent. De quelle manière le Modem compte-t-il mettre cette gouvernance en place ?

Il faut mettre de l’ordre dans tous les dispositifs qui s’empilent et qui n’ont aucune efficacité. A trop vouloir faire des dispositifs spécifiques aux quartiers, on peut se demander si le droit (comme l’école, l’emploi ou la culture) ne se désengage pas. Pour François Bayrou la vraie question qui se pose et ce, quelle que soit le territoire, c’est celle de l’égalité. Nous allons donc mettre en place un ministère de l’égalité qui prendra en charge toutes les difficultés liées à la classe sociale, au territoire, au sexe, etc. Et la question de la politique de la ville serait traitée dans ce ministère-là. C’est là que nous regarderons de très près les inégalités dues au marquage territorial du centre et de la périphérie, aux problèmes d’enclavement par rapport aux transports, etc. Tous les ministères seront appelés à coopérer pour réduire la fracture sociale et territoriale. On doit arrêter les petites expérimentations dont chacun aime se gargariser pour dire qu’il a fait quelque chose ! Concrètement, pour vous donner un exemple, il s’agira d’aller voir le ministère de l’éducation et lui demander comment se fait-il que la réussite scolaire soit moins importante dans tels quartiers, quels moyens donnons-nous à ces quartiers pour qu’ils s’en sortent ?

Comment comptez-vous lutter contre les problèmes de discrimination, comme celles à l’emploi par exemple ?

On a beaucoup parlé des discriminations comme d’un phénomène malveillant, raciste mais il y a énormément de discriminations qui sont indirectes, systémiques. Chacun sait qu’aujourd’hui, il n’y a pas un égal accès à une orientation ouverte. Par exemple, il apparait que dans certains quartiers et certains établissements scolaires, les orientations se font systématiquement vers des lycées professionnels ou vers des cycles courts. L’agence pour l’orientation scolaire que propose François Bayrou sera l’instrument pour lutter contre les discriminations à ce niveau-là. Elle exigera, par exemple, du ministère de l’éducation qu’il veille à ce qu’il y ait l’égalité sur la politique d’orientation. 

Quid du remplacement des fonctionnaires qui partent à la retraite ?

Nous nous engageons à remplacer tous les fonctionnaires mais pour autant, nous allons prioriser les fonctionnaires selon les fonctions qui leur sont dévolues : il y aura des redéploiements. Tout ça pour dire qu’on n’a pas une vision comptable. Et on considère que les populations les plus fragilisées ont d’autant plus besoin de ce redéploiement.

Sur la question de la laïcité, vous avez dit que celle-ci doit assurer l’égalité de traitement de toutes les religions et en même temps, vous avez dit que certaines « exaltations » vous faisaient peur. Pouvez-vous expliciter ?

Il y a eu une revendication très forte de certaines populations autour de leur héritage, de leur culture. Toutes les identités personnelles peuvent devenir des refuges identitaires quand elles ne sont pas reconnues et minorisés. Moi je suis présidente des Marianne de la diversité et j’ai défendu la diversité comme un apport à notre république comme un acte essentiel de la démocratie et du pluralisme. Il y a des questions importantes auxquelles on doit répondre comme celle des lieux de culte ou des cimetières. Mais quand on parle d’accommodement, jusqu’où peut-on aller ? Quand dans l’espace public on induit qu’il y a des lois qui doivent être supérieures à la loi républicaine, je dis non.

Si François Bayrou n’est pas élu, quels seront vos actions de là où vous serez ?

Nous ne voulons pas imaginer cette issue. Nous menons une campagne qui porte ses fruits. Hier, nous avons lancé le référendum du 10 juin pour la moralisation de la vie publique et on a eu des retours extrêmement importants. Donc, nous luttons contre la bipolarisation qui enferme dans le bloc contre bloc.

Quel est votre rapport personnel aux quartiers populaires ?

J’en suis issue. J’en garde une image extrêmement positive où il y avait une réelle mixité. A cette époque, les étrangers étaient tolérés parce qu’ils étaient invisibles. A cette époque on pensait encore au retour au pays d’origine. Aujourd’hui, je suis encore attachée à ces quartiers de par mon travail sur les questions sociales et de discrimination. On a longtemps cru que l’ascension se ferait à travers l’école et cette attente a été trahie.
 

Propos recueillis par Meriem Laribi

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