
Qu ’on t -ils fai t de leurs 5 ans ? Salah Amokrane

« Investir dans l’humain plutôt que dans la pierre »
« Au terme « émeutes », je préfère le mot « révolte ». Un événement pareil dans trois cents quartiers pendant trois semaines, sans véritable délinquance de type pillage, on est bien là dans la révolte. Pour moi, c’est l’un des faits politiques majeurs de ces vingt dernières années.
C’est un tournant politique qui aurait dû faire des quartiers une priorité…Aujourd’hui, par rapport aux années 90, c’est vrai que la lutte contre les discriminations est entrée dans le débat public. En revanche, la question des inégalités ethniques empire, aggravée par une situation sociale dégradée avec un chômage culminant à 50% voire 60% dans certains quartiers. Ajoutons à cela une certaine tendance à exacerber les discriminations… Une catégorie d’élus très à Droite ou même à Gauche mettent volontiers de l’huile sur le feu.
Les quartiers populaires qui pètent, c’est un bon fond de commerce. En même temps, ils n’ont pas besoin de faire beaucoup pour que cela dégénère. A Toulouse, on ne peut pas mettre tous les problèmes sur le dos de la mairie. La réalité, c’est aussi le manque de représentation des quartiers dans les formations politiques. Peu d’habitants des quartiers se retrouvent dans une organisation politique. On reproche aux jeunes de ne pas voter mais difficile pour eux de se positionner quand l’offre ne leur parle pas. Alors, ceux qui votent le font par défaut, sans conviction. Et quand est au chômage, la politique n’est pas une priorité. J’ai été élu d’opposition à Toulouse, mais c’est un peu la course à l’échalote de la diversité. C’est vrai que j’aurais pu enchaîner, j’ai eu plusieurs propositions en 2008. Mais à un moment donné, l’impact politique nécessite d’être relayé par un mouvement.
Etre élu c’est intéressant mais sans un parti derrière, c’est difficile. L’urgence, selon moi, est d’inviter le social dans la politique de la ville. Les jeunes ont besoin de travailler, ne serait-ce que pour prendre un appartement, se mettre en ménage. Avec des pics de chômage, des écoles de seconde zone et des logements délabrés, ce n’est pas évident! Pourtant, les habitants ont les mêmes envies qu’ailleurs. Ce sont des gens normaux. »