
L'Ecole Miroir dans le sillage d'Alvin Ailey

Epinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis), capitale de la danse ? Des membres de la troupe d'Alvin Ailey, à Paris pour les Etés de la danse, y dirigeaient une masterclass à l'Ecole Miroir, vendredi 29 juin.
Des Américains à Paris. A Epinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis), plus précisément. Des membres de la troupe d'Alvin Ailey, célèbre danseur new-yorkais décédé en 1989, animaient une masterclass, à l'Ecole Miroir. Un choix qui ne doit rien au hasard. Car ce "cours de maître" public était prodigué à une quinzaine d'élèves issus des quartiers populaires, tous inscrits à l'Ecole Miroir.
Intermédiaire de l'événement ? L'ambassade des Etats-Unis à Paris. "Le département d'Etat nous a contactés car la troupe d'Alvin Ailey est ambassadrice culturelle des USA à travers le monde", précise un membre du service de presse. Une opportunité en or pour faire connaître l'Ecole Miroir dont le premier cycle de formation s'est achevé, le 30 juin dernier.
Fame spinasienne !
Lancée en octobre 2011, l’Ecole Miroir est une sorte de "Fame à la française", résume Catherine Jean-Joseph Sentuc, la co-fondatrice avec Alan Boon. Et d'ajouter, "aux Etats-Unis, les comédiens se doivent d'avoir plusieurs cordes à leur arc." La danse, la comédie, la littérature… L'Ecole Miroir, totalement gratuite, est un ovni dans l'enseignement artistique française. "En fait, le projet tel que nous l'avons conçu est inédit en France."
Une preuve de l'utilité d'une telle école, "fondée sur l'expérience du refus", remarque Catherine Jean-Joseph Sentuc. Une pique lancée aux pourfendeurs de la diversité. De nature optimiste, elle puise de ses échecs "une source d'imagination et de créativité." L'Ecole Miroir en découle. Une philosophie qu'elle instille dès les premières lignes du projet.
Décomplexer les regards
L'idée de créer une école d'art à l'américaine lui vient d'Alan Boon, un ami comédien pour qui elle fut agent artistique, aujourd'hui devenu son comparse. "L'an dernier, Alan m'a confiée vouloir reprendre une carrière de comédien. Je lui ai rappelé les blocages en termes de diversité. Il a alors évoqué ce projet." Après 3 semaines de réflexion, elle se décide à le suivre dans cette aventure. Très vite, les rendez-vous institutionnels s'enchaînent. Elle, qui a ses ancrages à Epinay-sur-Seine- elle y est née, y a grandi-, prend contact avec Hervé Chevreau, le maire sans étiquette de sa ville natale. "On a de suite pensé au rayonnement artistique d’Epinay-sur-Seine avec notamment les studios Eclair." Si le projet l'enthousiasme, l'édile n'est pas en mesure d'apporter une aide financière. "On lui a dit que nous ne voulions pas d'argent mais avant tout un local où installer notre école. Ca a marché !", s'exclame-t-elle. Le projet se met en route. Celle qui fut le premier agent de Marion Cotillard a du ressort et un carnet d'adresse bien fourni. Elle active alors son réseau et se tourne vers Lagardère. Takis Candilis la soutient d'emblée. Rien de surprenant. Depuis qu'il l'a débauchée de France 2 pour rejoindre le service fiction de TF1, l'homme lui voue une totale confiance. "Lagardère devrait même produire avec les jeunes de Miroir des formats courts: "Wanted", un projet encore confidentiel…"
Faire oeuvre sociale...
Une posture que Catherine Saint-Joseph Sentuc s'attache à reproduire. "J'ai un réseau et l'intérêt, c'est surtout de le mettre au service des jeunes", insiste t-elle. Frédéric Mitterrand, alors ministre de la Culture et de la Communication, s'enthousiasmait d'ailleurs de "rencontrer des gens reconnus dans leur métier, n'appartenant pas aux institutions et qui retransmettaient leur expérience dans le social." La promotion inaugurale porte bien les valeurs chères aux fondateurs. Les 16 élèves sont tous issus de quartiers populaires. "Tous sont ultra-motivés par le projet." Il faut dire que la sélection fut sans merci. Première expérience artistique, entretien, lettre de motivation et vidéo, les candidats ont été triés sur le volet. Pas d'école buissonnière. Tous ont suivi avec assiduité les cours dispensés par les quatre professeurs dont un spécialiste des masques !
De l'école jusqu'à l'insertion
Si l'art peut être une lubie pour certains, pour Catherine Jean-Joseph Sentuc, l'Ecole Miroir a un rôle en termes d'insertion. "Le but est de les former aux métiers d'acteur, de metteur en scène et de réalisateur." Réseau aidant, Alan Boon et elle ont déjà noué des partenariats. "Nous avons monté un pool de producteurs. Quand ils tournent, ils s'engagent dans la mesure du possible à faire tourner nos jeunes." Une dizaine d'entres eux ont ainsi pu effectuer des missions chez Endémol ou Lagardère. D'autres projets devraient voir le jour avec France Télévisions, notamment. Prochaine étape ? Pérenniser l'école. "Pour assurer la formation étalée sur 2 années, l'Ecole Miroir table sur 300000 euros de budget par an."