Europe : un parcours du combattant pour les assos de quartier...

Moïse Gomis à Radio HDR
Le 22-05-2014
Par Erwan Ruty

Moïse Gomis est administrateur et fondateur de radio HDR, implantée dans un quartier populaire de Rouen. En 2006, il monte un projet financé par le FSE. Une expérience riche, mais qui sera presque fatale à son association qui existe pourtant depuis 1994. Pourtant, Moïse ne lâche rien, un nouveau financement est monté : l’Europe, il y croit encore, d’autant que la radio a survécu. Mais sans lui.

 

Le Fond social européen (FSE), c’est le sésame, veulent croire bon nombre d’associations. « On avait épuisé tous les financements locaux possibles, le Grand projet ville (GPV) nous a incité et accompagné avec une consultante spécialisée : leurs crédits européens n’étaient pas tous consommés ! raconte Moïse. C’est eux qui montaient le projet, qui faisaient la demande de financement au GPV, ils faisaient un appel à projet simplifié. Et puis il y a eu un chgement de municipalité. On s’est retrouvés à faire la demande en direct. »



« On était des nains par rapport à leurs interlocuteurs habituels »


Il faut dire que HDR avait déjà mené un chantier d’insertion qui avait bénéficié du FSE : « Euroradio », en 2006. Vingt personnes formées au journalisme, à l’animation, et à la technique, avec l’aide de sociétés de production locales, de France 3 et de radio-France Normandie formées : « Des gens en recherche d’emploi, des seniors, des handicapés, des jeunes « de la diversité ». L’Europe ne demande pas de faire des actions sur les quartiers, mais sur des personnes « éloignées de l’emploi ». Avec notre interlocuteur, la Directte (Direction régionale des entreprises, de la consommation, de la concurrence, du travail et de l’emploi), la relation était bonne. On était des nains par rapport à leurs interlocuteurs habituels : 160 000 euros, pour eux, c’est un petit budget ! D’habitude, ils fiancent les Esat (Etablissements de service d’aide par le travail, en direction des handicapés, ndlr), les professionnels de l’insertion, des structures intermédiaires… Mais ce qui les intéressait, c’était notre approche « interculturelle » et « diversité », en plus de l’insertion… »



Des projets exemplaires ?


Problème : la radio n’arrive pas à obtenir le statut de chantier d’insertion qui lui donnerait accès aux financements « insertion » du département par exemple. « Quand on a deux commissaires européens, un suédois et un norvégien, qui viennent visiter la radio, avec tout le ban et l’arrière-ban qui est là tout tremblant et qu’on te dit « votre projet est exemplaire », tu te dis, c’est bon ! » En plus, ils sont aidés par une « consultante européenne », via la Préfecture. « Elle nous a décomplexés », juge-t-il avec le recul. Mais patatra : faute de trésorerie (« tu as un décalage d’au moins un an avant que les premiers financements arrivent »), l’asso boit le bouillon dès 2008. Tribunal, redressement... sur neuf ans ! « En fait, en fin d’année, les autres financeurs locaux continuent à ne te donner que des miettes, plutôt que d’investir. » Pas dégoutté pour autant, HDR remonte direct un nouveau projet avec un autre organisme, le Feder (Fonds européen de développement économique régional) ! Moïse insiste, qui a la foi du charbonnier : « La procédure est plus simple », jure-t-il. Pourtant, le Feder te construit d’habitude plutôt des routes ou de la fibre optique…

La leçon ? « Tu dois suivre une formation avant de te lancer là-dedans. C’est une autre logique ». Même si aujourd’hui les dossiers de financement français sont construits sur le même modèle. Faut-il s’en féliciter ? En tous cas, Moïse n'est plus salarié de radio HDR depuis cette expérience...

 

NB : Moïse Gomis est par ailleurs secrétaire général de Presse & Cité

 


 

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