
Discriminations : en Île-de-France, la droite fera-t-elle mieux que la gauche ?

Les projets de lutte contre les discriminations seront-ils plus ambitieux sous la droite qu’ils ne le furent avec la gauche, en Île-de-France ? La présidente du Conseil régional, Valérie Pécresse, par la voie de Patrick Karam, a en tous cas choisi d’aborder frontalement ce sujet. Le 29 septembre, la nouvelle mandature présentait son programme, en un mot : la sanction plus que la prévention.
Et pour une fois, on appréciera cet angle d’attaque, véritable mantra droitier en matière de sécurité, surtout s’il est appliqué avec la même énergie qu’il est proclamé. C’est que Patrick Karam, conseiller régional en charge de cet habituel fourre-tout dans lequel on jette à la fois la jeunesse, les sports et la vie associative, mais aussi les discriminations, n’est pas un néophyte en la matière. Guadeloupéen d’origine libanaise, il est actif dans le domaine du soutien aux minorités (en France comme à l’international) depuis des années ; en particulier à travers le Collectof Dom (pour les Français d’Outre-Mer), au début des années 2000. Ce qui ne l’empêche pas de rester un fervent partisan de Nicolas Sarkozy, y compris ces derniers temps…
La grande famille de l’antiracisme républicain
Autre surprise de ce tournant stratégique : la mise en avant, à de très nombreuses reprises lors de l’allocution de M. Karam, ce 29 septembre, de l’action de Samuel Thomas (président de la Fédération des maisons des potes, Fmdp) et de Dominique Sopo (président de Sos Racisme)… en temps de crise identitaire, la grande famille républicaine prend tout son sens… Il faut dire que ces associations ont souvent échangé entre elles au tournant des années 2000, dans une vision universaliste du combat antiraciste, aujourd’hui très décrié par des collectifs et des acteurs issus des quartiers qui fondent leurs combats sur angles plus « communautaires » (islamophobie, négrophobie etc.).
La sanction plus que la prévention
Reste que le parti pris des appels à projets du Conseil régional est réellement ambitieux : selon l’expression de M. Karam, il s’agit donc « d’aller au-delà de la prévention, vers la sanction. On change de braquet. On fera à la fois de la sanction, et de la publicité des sanctions. On dit aux personnes qui discriminent : vous n’allez pas jouer à cache-cache avec nous plus longtemps, on va vous trouver. Ca suffit ! » Un discours offensif qui fait suite à la prise de parole dépitée de Samuel Thomas, rappelant qu’à peine quelques procès pour discriminations ont eu lieu en plusieurs années d’existence du Geld (Groupe d’études et de lutte contre les discriminations, mis en place en 1999), puis de la Halde (active de 2005 à 2011), alors que des millions d’habitants de l’hexagone affirment avoir été un jour victimes d’une discrimination… « Même pas assez de procès pour pouvoir bâtir des statistiques ! » s’insurge le président de la Fmdp.
Vers l’égalité réelle ?
Ce dernier va plus loin que les pétitions de principe de la Région : « Peut-on envisager qu’une plainte soit soutenue auprès du procureur par la Région, pour qu’elle ne soit pas classée sans suite par lui ? ». « J’y suis favorable, mais il faut voir se cela est juridiquement possible », répond l’élu. Autre élément cardinal : la création prévue d’une agence régionale pour l’égalité femmes-hommes et la lutte contre les discriminations ». Aux contours encore non définis. Mais l’ensemble se veut en tous cas porteur d’une politique plus active tendant à « obtenir des résultats concrets » en matière « d’égalité réelle » (vieux concept marxiste, dont on sait à quel point il est devenu un plat élément de langage…), selon l’exposé des motifs du dispositif. Aide financière « aux acteurs qui apporteront des réponses adaptées en matière de prévention mais aussi de sanction », poursuit cet exposé, ainsi qu’un « appui juridique aux victimes », ainsi qu’à ceux qui instruiront des procédures judiciaires (autant que, par exemple, des testings, hissé au rang d’outil principal lors de cette rencontre).
Emploi, logement, sport, formation sont les domaines privilégiés, mais un soutien à des radios et télévisions locales qui seraient acteurs de cette politique sera aussi initié via des conventions pluri-annuelles, à travers des partenariats (au-delà de ce dispositif présenté). Focale large, donc (y compris en termes de public : personnes âgées, handicapées, jeunes des territoires ruraux sont concernés), et volonté offensive. L’avenir dira si les réalisations sont à la hauteur des ambitions…