
Contrôle au faciès : stop le parjure des promesses électorales

Il est acquis depuis le 17 octobre, suite à la remise du rapport du Défenseur des droits Dominique Baudis, que la promesse de François Hollande de limiter le contrôle au faciès ne verra pas le jour. Le lendemain, le tribunal de Pontoise a prononcé un non-lieu dans l’affaire Ali Ziri, retraité algérien de 69 ans, décédé suite à un contrôle de police à Argenteuil, en 2009.
Enfin, ce même jour est celui de la commémoration du 17 octobre 1961, où plusieurs dizaines de manifestants algériens pacifiques ont été tués par la police. Beaucoup de symboles lourds, très lourds. Que n’effacera pas chez les jeunes générations quotidiennement confrontées aux contrôles abusifs par les forces de l’ordre, un laconique communiqué prononcé à la dérobée par le président de la République reconnaissant la tragédie du 17 octobre 1961.
« On n’est pas dans une démarche anti-police »
Pourtant, les initiateurs de la campagne « Stop le contrôle au faciès » le clamaient : « On n’est pas dans une démarche anti-police. On a travaillé avec les syndicats. Valls abandonne la police alors qu’il croit l’aider : ses solutions sont des mesurettes, on lui oppose beaucoup de jeunes citoyens qui risquent de ne plus croire en la police, en la justice. Ce qu’on réclame, c’est gagant-gagnant. » Ainsi s’exprimait Franco, co-animateur du collectif contre le contrôle au faciès, lundi 15 octobre, à la veille de la remise du rapport de Dominique Baudis, se prononçant plutôt pour la re-inscription du numéro de matricule sur les uniformes de police. Le gouvernement préfère jouer perdant-perdant : ainsi est enterrée la mesure la plus symbolique à destination des quartiers, qui avait été prise par les socialistes en campagne avant la présidentielle.
Stop le contrôle au faciès : le changement est en nous
Dépité, l’un des animateurs de la campagne rageait : « On n’est pas des roues de secours qu’on utilise avant les élections ! » Même si ceux qui se sont mobilisés depuis des mois sur cette thématique ont pris un sale coup derrière la nuque, reste que la campagne ne cessera pas : un teaser de la seconde saison d’une série qui s’annonce en plusieurs saisons, intitulée « Mon premier contrôle d’identité » a été mise en ligne la même semaine. Où l’on peut voir des avocats, des élus (dont une sénatrice), des sportifs de haut niveau, des contrôleurs à la SNCF, des journalistes, des chercheurs, tous victimes du « délit de faciès » auprès de la police, témoigner de cette humiliation nationale raconter leur expérience. Et surtout, où l’on peut voir le témoignage rare et poignant de Majid El Jaroudi, responsable de l’Agence pour la diversité entrepreneuriale, évoquant le meurtre par un CRS d’un de ses proches, Lahouari Ben Mohamed… un 17 octobre 1980, à Marseille. Quelques années plus tard, avec pour point de départ cet assassinat, est lancée la Marche pour l’Egalité. Et cette tragédie se conclue par « switch » digne d’un film de Scorsese, puis par un « Le changement, il est en nous » d’un courage, d’une abnégation et d’une force morale inouïes :
Deux millions de vus
On peut enfin entendre, sur ce film, Jean-Marc Ayrault dire, la main sur le cœur, à BFM TV le 1er juin dernier : à la question « La mesure sera prise ? », le premier ministre répond clairement : « Elle est en préparation, le ministre de l’Intérieur y travaille. » Le journaliste insiste : « Elle sera prise ? » Réponse : « Bien sûr ! C’est aussi un engagement qui a été pris. Vous m’avez parlé des engagements. Vous savez, il y a des engagements qui sont forts, qui sont lourds, qui sont symboliques. »
Rappelons que le 6 octobre, un lycéen sans histoires de Sucy-en-Brie (Val de Marne) aurait été emmené dans une forêt et passé à tabac par une équipe de la Bac. Sa famille a porté plainte. Le récépissé ne se fera pas. Pas maintenant. Une longue marche pour la dignité (et contre le parjure politique ?) recommence. N’oublions pas que plus de deux millions de personnes ont vu la première campagne sur le web. Quel homme politique peut longtemps ignorer cela ?