
APRES : un coup de pouce pour mieux réussir après l’école

Créée en 2004, l’Association pour la promotion de la réussite scolaire, l’Après, intervient dans des collèges et des lycées d’Ile de France, classés en zone d’éducation prioritaire (ZEP). L’idée : en faisant intervenir des professionnels dont le parcours témoigne d’une ascension sociale, démontrer que l’on peut réussir grâce à l’école et briser les barrières que certains peuvent se fixer.
Jeudi, 10h15, collège Georges Clémenceau dans le XVIIIème arrondissement parisien. Dans la salle des professeurs, deux jeunes intrus. Nour et Zahra, respectivement directeur achat et logistique dans le privé et chef de service à la Direction régionale de la jeunesse et des sports. Membres de l’Après, ils viennent partager leur expérience avec une classe de 3e de cet établissement classé ZEP. « Je suis membre depuis peu de l’Après, confie Zahra dont c’est la première intervention. Moi, je crois en l’école républicaine, c’est elle qui m’a donné la chance de réussir. J’avais envie de retransmettre ce qu’on m’a donné. Plus encore à ces enfants qui viennent de quartiers difficiles. » Pas question pour autant de servir un discours misérabiliste. « On leur donne du concret, pas de blabla. L’idée c’est de briser des préjugés et leur dire que si nous on a réussi, tout le monde peut le faire, à condition d’être motivé. »
« Vous allez comprendre que l’on peut partir de très loin et arriver très haut. »
La cloche sonne la fin de la récréation. Nour se charge des présentations. « Vous connaissez l’Après ? » « Oui », répondent certains. L’association n’en est pas à sa première intervention dans l’établissement. Puis Zahra se lance. « Mes parents ne savaient ni lire, ni écrire. Mon père était ouvrier, ma mère femme de ménage. Ils n’avaient pas beaucoup de moyens, mais ils se sont sacrifiés pour nous acheter des livres. Alors j’ai lu et j’ai travaillé. J’ai fait des études littéraires. J’ai eu mon bac. Puis je me suis dit puisque ça marche, tentons l’impossible, la fac. J’y suis allée. J’ai passé un concours, je l’ai eu. Pas parce que j’étais plus intelligente, mais juste parce que j’ai travaillé. Vous allez comprendre que l’on peut partir de très loin et arriver très haut. » Zahra est devenue fonctionnaire. « Je suis contente, j’ai réussi à faire ce que je voulais faire. Et je continue à apprendre. En janvier, je retourne à la fac pour des études de gestion. » Nour prend le relais. « A l’école, j’étais plutôt au fond de la classe, un élève moyen. J’étais passionné de foot, mais arrivé au lycée, j’ai dû faire un choix, j’ai choisi les études. » Un choix qui va payer puisque après des études scientifiques, Nour s’oriente vers une école d’ingénieur avant de poursuivre avec une école de commerce. « Tout en travaillant. Ce n’est pas incompatible. Au fur et à mesure des années, j’ai été amené à avoir plus de responsabilités, donc j’ai eu besoin d’ajouter une corde à mon arc. »
« De l’informatique ou du graphisme. Ou peut-être du dessin. »
Passionnés et convaincus, l’un comme l’autre reviennent sur le « chemin » qu’ils se sont frayés, avec beaucoup d’aisance et sans banalités. Ce qui semble avoir de l’impact auprès des élèves qui ne tardent pas à les interroger. « Vous saviez, quand vous aviez notre âge, ce que vous vouliez faire comme métier ? » demande une jeune adolescente à Nour. « Non, en tout cas pas ce que je fais aujourd’hui ». Une question à laquelle les élèves doivent d’ors et déjà réfléchir. L’année de troisième est une année d’orientation. Pour les aider à faire leur choix, un stage d’observation est prévu au mois de février. La moitié d’entre eux a déjà trouvé, les autres non. Pas évident quand on ne sait pas ce qu’on veut faire. Même si on a quelques idées, plus ou moins vagues. « Des études scientifiques. » « De l’informatique ou du graphisme. Ou peut-être du dessin. » « Quelque chose dans la musique ». D’autres ont déjà fait leur choix mais ignorent comment y accéder. « Pour être comptable, il faut faire des études générales ? » « Comment on fait pour être animateur sportif ? » « J’ai envie de donner, de créer, faire quelque chose dans la communication mais je ne sais pas trop comment ? » A chacun, Nour et Zahra, complétés par le professeur, apportent des réponses ou, à défaut d’en avoir, des conseils. Comme se rendre au Centre d’information et d’orientation de leur établissement, le CIO. « Moi non plus je n’avais pas d’idées, alors je me suis faite aidér par des personnes dont c’est le métier », rappelle Zahra. Et d’insister sur l’intérêt des stages. « Même si vous n’avez pas trouvé le stage intéressant, c’est bien, parce que vous saurez alors ce que vous ne voulez pas faire. Le tout c’est d’essayer et de ne pas se mettre de barrières. »
La séance se poursuit ainsi pendant deux heures à l’issue desquelles les intervenants auront amené les élèves à s’interroger sur leur avenir. C’est la volonté du professeur Lauthrey. « J’ai commencé à faire appel à l’Après il y a quatre ans. C’était très bien, alors on a recommencé. Dans la salle des professeurs, il n’y a que des retours positifs. On est sollicités par de nombreuses associations mais avec eux le message passe bien. »
Dounia Ben Mohamed