Depuis 20 ans le collectif Fusion implanté à Villiers-Le-Bel s’appuie sur la culture pour mener une action sociale auprès de la population du Val d’Oise.
A côté d’une activité dominante basée sur le spectacle vivant mélangeant théâtre, musique et projection vidéo, l’association a lancé en 2000 la revue semestrielle Sakamo, sur le thème des migrations et du déplacement, qui s’appuie largement sur des témoignages et des archives familiales des habitants.

L’association est abritée dans un pavillon avec jardin en attendant d’investir les nouveaux locaux qui lui seront dédiés à proximité du quartier des Carreaux. Coordinateur et principal artisan de la publication, Dominique Renaux a suivi une formation en anthropologie historique à l’EHESS parallèlement à une carrière dans les arts graphiques. Ce natif de Villiers-le-Bel , s’y est réinstallé il y a 20 ans après un intermède parisien. Il revient sur le contexte de création de la revue : « Avec l’affirmation du FN nous avons proposé de travailler sur le combat pour l’égalité, la prise en compte des diversités, pour faire en sorte que chacun puisse se dire « je suis un peu d’ici ». D’où l’idée de proposer aux habitants de prêter leur photo de mariage, une cérémonie globalement commune à toutes les cultures. C’était l’occasion de demander aux gens d’où ils viennent, d’où viennent leurs parents, leurs grands parents. Le point commun est qu’ils viennent tous de quelque part, que ce soit de province, des pays périphériques ou plus lointains (…) Sur 500 photos obtenues 110 ont été sélectionnées et accompagnées d’un titre et d’un petit texte de 15 lignes.»

L’initiative va connaître le succès et remporter, sous forme d’exposition le premier prix de la Fondation pour l’Intégration Républicaine (FIR). Elle va fournir également le principe de la revue : se fonder sur les archives iconographiques familiales et municipales et la parole des habitants, en les accompagnant d’une vulgarisation de travaux scientifiques sur les questions migratoires.

L’association, qui emploie 4 salariés, entre en contact avec les habitants à travers les différents événements qu’elle organise, mais aussi, pour les plus jeunes d’entre eux, en intervenant en milieu scolaire. Un partenariat s’est notamment tissé avec le Collège Martin Luther King de Villiers-le-bel, où la structure intervient depuis six ans. Les articles de Sakamo ont régulièrement comme point de départ l’interaction avec les élèves et souvent leur méconnaissance de la complexité historique. A l’image du projet « Dessine moi un français » pour le numéro 13 intitulé « Métis » pour lequel les élèves devaient peindre leur autoportrait sans pinceaux et avec des pigments naturels, pour mêler selon Dominique Renaux « le sensible et la réflexion, faire de la pédagogie par le détour, réfléchir sur l’histoire et ne pas avoir une position manichéenne comme par exemple « les blancs sont les forts, les héritiers des esclavagistes et les noirs les faibles, les opprimés, sans pour autant excuser qui que ce soit » ».

Sakamo, tiré à mille exemplaires, est disponible par abonnement et « diffusion militante de proximité ». De par son propos complexe mais vulgarisé, alimenté de travaux en sciences humaines, et sa richesse iconographique puisée dans les archives des habitants, la revue occupe une place atypique mais non moins intéressante dans le paysage des médias des quartiers.

YT